L’année 2014 marque le 20e anniversaire du jumelage de la municipalité des Îles-de-la-Madeleine avec le département de la Manche de même que le 30e anniversaire du jumelage avec Miquelon. Ces deux partenariats sont significatifs et complémentaires et méritent d’être poursuivis.
Pourtant, depuis quelques semaines, seul le jumelage avec le département de la Manche semble retenir l’attention de la municipalité des Îles. Les élus madelinots ont en effet reçu dans l’archipel une demi-douzaine de délégués de la Manche en juillet dernier puis une délégation d’une douzaine de personnes, pilotée par le maire Lapierre, leur a rendu visite la semaine dernière.
Ces missions aller-retour ont été pour les participants l’occasion de rencontres de travail, de visites touristiques et d’échanges interculturels sans aucun doute riches d’enseignements. Les thèmes de l’érosion des berges, de la gouvernance des espaces de conservation et de la mise en valeur du patrimoine maritime ont notamment été abordés. De jeunes musiciens des îles ont aussi fait rayonner notre culture sur la grande scène du Festival des Traversées de Tatihou et nous en sommes tous bien fiers.
Or, pendant ce temps, le jumelage vieux de 30 ans avec la commune acadienne de Miquelon est passé complètement sous silence. Cela est d’autant plus surprenant que les liens avec nos frères de Miquelon sont inscrits dans l’histoire même du peuplement de l’archipel par les fidèles de l’abbé Allain en 1793. Ces repères historiques ont d’ailleurs été soulignés l’an dernier lors de la commémoration du 250e anniversaire de l’arrivée des premiers Acadiens à Miquelon, dont plusieurs vinrent peupler les Îles 30 ans plus tard.
Si le jumelage institué en 1984 avait été l’occasion de renouer nos liens historiques avec Miquelon, il a aussi permis de conjuguer ces liens au présent à travers de nombreux échanges culturels, institutionnels, sportifs, touristiques et commerciaux. Entre autres retombées de ce jumelage pour les Îles, notons une plus grande conscience des Madelinots quant à leur héritage culturel et leur patrimoine, l’apport à notre réflexion sur l’insularité (la double insularité pour les cas de Miquelon et de l’Île d’Entrée) et les liens que nous entretenons avec les instances gouvernementales. Rappelons par ailleurs que ce sont nos violonneux madelinots qui ont permis aux Miquelonnais de se réapproprier la maîtrise de l’instrument et ses musiques venues notamment de l’Acadie… et de Miquelon justement!
Faire fi de ce jumelage et de nos liens historiques avec Miquelon est d’autant plus regrettable que cela tranche avec la pratique établie en 2004, puis rééditée en 2009, de souligner ces deux jumelages simultanément en impliquant les trois partenaires à la fois. Cette façon de faire initiée il y a 10 ans avait d’ailleurs permis aux gens de la Manche de faire la connaissance de leurs compatriotes de St-Pierre et Miquelon ici même dans l’archipel, grâce à l’intermédiaire des Madelinots.
Ces jumelages parallèles et complémentaires ont par la suite mené à la conclusion d’une entente de coopération décentralisée avec la Manche et Saint-Pierre et Miquelon, signée en 2009, devant permettre d’approfondir ensemble et d’échanger des solutions sur les thématiques communes de la vie insulaire et maritime tels la pêche, le tourisme, l’érosion côtière, les télécommunications, la gestion des matières résiduelles, l’aménagement du territoire, l’environnement, l’énergie, la culture et l’éducation. Il reste beaucoup à faire pour la communauté madelinienne dans chacun de ces domaines et le partage d’expertise avec des partenaires comme ceux de la Manche et de Saint-Pierre et Miquelon n’est pas vain.
Certains diront que ces jumelages ne servent à rien, qu’ils constituent un gaspillage de fonds publics qui ne sert qu’à permettre aux élus et quelques accompagnateurs de se payer un petit voyage aux frais des contribuables. Le refrain est connu, tout comme celui qui veut que les investissements en culture ne rapportent pas. Puis on se dit fiers de nos artistes et artisans qui donnent une notoriété si exceptionnelle et bénéfique à notre archipel…
Le gouvernement du Québec lui-même favorise ces jumelages et les ententes de coopération décentralisée des communautés locales. Depuis la Révolution tranquille que le Québec s’ouvre au monde non seulement à travers la diplomatie gouvernementale mais grâce aux jumelages des communautés locales et aux échanges entre les citoyens qui habitent ces territoires. C’est entre autres ainsi que le Québec et ses régions évoluent, grandissent et innovent. Plusieurs Madelinots ont aussi eu la chance de découvrir ces territoires à travers des stages de travail, des tournées culturelles ou commerciales.
À ce chapitre, les jumelages entre les Iles-de-la-Madeleine et la Commune de Miquelon, les liens avec l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon de même qu’avec la Manche ont été féconds et doivent se poursuivre au-delà des délégations officielles une fois aux 5 ans. Les moyens de télécommunication actuels permettent d’ailleurs d’entretenir des liens plus fréquents et permanents. Il y a encore beaucoup à faire, beaucoup à partager, beaucoup à apprendre et cela avec un bénéfice réciproque.
