L’insularité, un rempart contre l’austérité?

Les impacts du régime d’austérité imposé par le gouvernement Couillard pourraient être particulièrement ressentis dans les régions économiquement fragiles et dépendantes du soutien de l’État. Alors qu’en Gaspésie, en Abitibi et ailleurs les citoyens et les élus s’inquiètent, s’interrogent et se mobilisent, aux Îles, c’est le calme plat. Comme si la question n’appartenait qu’aux autres, comme si l’insularité constituait un rempart à l’austérité.

On peut bien sûr appuyer les décisions gouvernementales, partager l’idéologie du régime minceur, trouver légitimes les mesures de rationalisation visant à atteindre le déficit zéro et être prêt à consentir à tous les sacrifices personnels ou collectifs pour «rénover l’État».

Ce qui étonne, toutefois, c’est la passivité unanime dans l’espace public madelinot. Une attitude qui tranche d’ailleurs complètement avec la mobilisation monstre qu’a provoqué dans l’archipel la réforme de l‘assurance-emploi il y a un peu plus d’un an. Les principales critiques envers le gouvernement Harper étaient alors l’absence d’études d’impacts précédant la réforme et la non-reconnaissance des particularités régionales.

Sans débat préalable ni consultation, et sans en avoir soufflé mot en campagne électorale, le gouvernement du Québec a pourtant entrepris la plus profonde transformation du rôle de l’État québécois depuis la Révolution tranquille.

Pour un archipel dont l’économie dépend largement des transferts gouvernementaux, des emplois dans la fonction publique et parapublique, des programmes et des subventions, l’avènement d’un état «moins dépensier», selon les termes du président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, n’est pas une très bonne nouvelle. La baisse de 2% des dépenses décrétée dans l’appareil d’état aura forcément un impact. Il en est de même pour la réduction envisagée de la masse salariale des employés gouvernementaux.

Il faut reconnaître que le gouvernement a su rassurer les Madelinots lors du dévoilement des deux premiers volets du plan d’austérité Couillard. En santé, le ministre Barrette a proposé la fusion des établissements de santé des Îles à ceux de la Gaspésie pour se raviser dès le lendemain et leur accorder un statut d’autonomie. En éducation, le ministre Bolduc a confirmé le maintien de la Commission scolaire des Îles avant même d’annoncer les fusions partout ailleurs en province.

C’est sans doute ce qui a finalement poussé la Municipalité des Îles à se désolidariser de la Gaspésie et des autres régions du Québec pour demander au ministre Moreau, sous l’angle de la spécificité insulaire, le maintien des sommes affectées au CLD pour le développement économique des Îles. Incidemment, c’est aussi en vertu de l’insularité que la municipalité souhaite convaincre le gouvernement d’octroyer un investissement spécifique et hors programme de 7 millions $ afin réparer les routes les plus abimées de l’archipel.

Avec le rapport Robillard, qui vilipende la croissance des dépenses municipales et recommande des coupes d’un milliard de dollars dans les transferts aux municipalités, le monde municipal se retrouvera plus que jamais au cœur de la tourmente. Insulaire, la Municipalité des îles y fera-t-elle exception?

La réduction de la taille de l’État passe le plus souvent par le pelletage de responsabilités vers les municipalités, sans les ressources financières conséquentes, comme on vient de le voir en matière de développement économique. Les élus locaux porteront non seulement le poids des responsabilités municipales, mais ils devront désormais rendre des comptes à leurs concitoyens sur la situation économique locale, une situation qui, aux Îles comme dans plusieurs autres régions, dépend largement des investissements gouvernementaux…

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