L’affirmation culturelle

La directrice de la Corporation de développement culturel Arrimage, Marie Aubin, tire sa révérence après 25 ans de précieux et loyaux services. Après un quart de siècle, il n’est pas exagéré de dire que Mme Aubin et son équipe ont contribué puissamment à donner à la culture la place qui lui revient dans l’espace socio-économique de l’archipel et un rayonnement par-delà nos frontières.

La mise sur pied d’Arrimage, en 1989, a servi de catalyseur à l’affirmation culturelle des Madelinots, tout comme la Révolution tranquille – et la création du ministère de la Culture du Québec – a entrainé celle des Québécois 30 ans auparavant. La corporation culturelle a permis à bien des acteurs de la scène culturelle et artistique de se révéler à eux-mêmes et aux autres, de prendre leur place dans la communauté et de faire rayonner l’archipel à travers le monde. Elle a aussi, et surtout, favorisé une prise de conscience de l’identité madelinienne, de ce que nous sommes et de ce que nous pouvons créer, bien au-delà de la sphère culturelle. Cet impact s’est traduit par la consolidation du sentiment d’appartenance, de fierté et d’affirmation sans complexe, mais inclusive, de la différence madelinienne au sein de la population en général, que l’on soit pêcheur ou travailleur d’usine, commerçant, ouvrier, enseignant, travailleur de la santé, fonctionnaire ou charpentier. Par ses actions et son soutien au secteur de la culture, Arrimage a donné une impulsion à l’affirmation culturelle de l’ensemble des Madelinots.

Notre ministère de la culture

Cela est d’autant plus positif que s’affirmer, c’est aussi s’affranchir. À travers le rayonnement culturel de l’archipel ces 25 dernières années, une certaine culture madelinienne s’est consolidée, en même temps que la fierté et la confiance de la diffuser et de la mettre en valeur. Cela se vérifie sans peine par le dynamisme observé dans le domaine de la musique, des arts de la scène, des métiers d’arts, etc. Le terreau était fertile, certes, mais encore fallait-il se mettre au travail, semer et arroser soigneusement la culture pour assurer la récolte. Le nombre de talents qui ont éclos n’est pas étranger au travail d’Arrimage.

Sans être reconnue par le gouvernement à titre de conseil régional de la culture, la corporation culturelle s’est associée à la municipalité pour obtenir un soutien financier récurrent. Elle s’est ainsi imposée comme l’exception culturelle madelinienne dans l’ensemble québécois. Elle est devenue notre «ministère de la Culture», sous-financée certes, mais ancrée dans la communauté et d’une remarquable efficacité.

Avec l’adoption de la politique culturelle de 2002, Arrimage devenait le maître d’œuvre d’une bonne partie du plan d’action qui en découle et dont les grandes orientations rejoignent celle du ministère de la Culture du Québec, justement. En guise de rappel, la politique culturelle repose sur certains principes ou fondements qui orientent l’action collective, tels l’affirmation de l’identité madelinienne, son caractère acadien et insulaire unique forgé par l’histoire et la géographie, la richesse du patrimoine, soutien aux créateurs, l’accès à la culture pour tous, la prise en charge collective.

Des réalisations concrètes

Les réalisations concrètes d’Arrimage, de sa directrice et de l’équipe ratissent large. L’organisme œuvre notamment à la concertation et au soutien des artistes et artisans. Que ce soit par son offre de formation, l’octroi de plus d’une demi-douzaine de bourses par année, dont celles spécifiques à la relève, ou par l’appui technique et financier à de multiples projets, Arrimage soutient et donne un coup de pouce aux créateurs. La mise sur pied, à cette fin, du Fonds de développement culturel de 320,000$, dont la pérennité est assurée, relève de l’exploit !

La corporation culturelle a piloté la publication d’ouvrages sur l’architecture et le patrimoine. Elle a parrainé l’enregistrement de quelques-uns des plus beaux hymnes des Îles dans les deux célèbres albums Le Tour des Îles, un coffret dont la popularité ne se dément après des années. Arrimage porte aussi une attention particulière au soutien à la professionnalisation des artistes. C’est ainsi que de plus en plus de Madelinots peuvent aujourd’hui aspirer à gagner leur vie en tant qu’artistes, contribuer à la vitalité du milieu et devenir des ambassadeurs de la culture d’ici.

Au fil des années, Arrimage a par ailleurs prouvé l’apport économique inestimable des arts et de la culture à l’économie locale. Chiffres à l’appui, la corporation a obtenu la reconnaissance de la culture comme un secteur économique à part entière. En synergie avec l’industrie touristique et bio-alimentaire, Arrimage a été un partenaire de premier plan dans le développement du tourisme culturel et gourmand. Entre autres initiatives à succès, notons le Circuit des arts visuels et métiers d’arts qui rassemble 18 boutiques, atelier et galeries pour soutenir la mise en marché des produits culturels et mettre en valeur la créativité et le talent des artistes d’ici.

Arrimage œuvre aussi à la promotion des artistes et au rayonnement de la culture madelinienne au-delà du territoire de l’archipel. Des liens tissés avec les communautés acadiennes de l’Atlantique et du Québec ont été soutenus, voire initiés par Arrimage. De même, le maintien des échanges dans le cadre des jumelages avec Tatihou, le département de la Manche et l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon est largement attribuable à l’action d’Arrimage.

Mission accomplie

Et l’action d’Arrimage est elle-même, les résultats obtenus, sont indissociables du travail professionnel, patient et consciencieux de la directrice sortante. Sa passion sincère pour le monde des arts et de la culture des Îles, son travail rigoureux, structuré et convaincant a grandement contribué à la reconnaissance du secteur et de l’organisme comme un partenaire de choix au sein des instances socio-économiques de l’archipel. L’esprit de collaboration, de concertation et l’engagement personnel de Marie Aubin envers la communauté lui auront valu l’estime de ses partenaires.

La mission de concertation, de soutien et de planification du développement des arts et de la culture d’Arrimage, ses fonctions de consultation, de représentation et de promotion ont été déployées de façon rigoureuse, constante et efficace à travers les années. Si, par définition, la mission de l’organisme doit se poursuivre, celle de sa directrice est accomplie!

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