Empêtré dans une autre histoire de trafic d’influence mettant cette fois en cause le président du Conseil du Trésor, Sam Hamad, le gouvernement Couillard n’avait pas le cœur à célébrer l’étape symbolique de la mi-mandat la semaine dernière. Après deux ans d’austérité, de compressions et de réformes, les Madelinots n’ont pas davantage de raison de se réjouir.
Sur le plan économique, personne ne conteste plus le fait que «l’effet libéral» promis par Philippe Couillard ne s’est jamais matérialisé au Québec. La croissance économique est anémique et l’emploi stagne. En subordonnant tout à l’atteinte de l’équilibre budgétaire en deux ans, un objectif qu’il a accompli, le gouvernement a lui-même plombé la relance économique, particulièrement en région. Pis encore, les leviers de développement régional sacrifiés compromettent sérieusement la capacité de reprise.
Les «vraies affaires»
Depuis l’élection du 7 avril 2014, les mesures d’économies imposées en région par le gouvernement ont pris la forme d’un démantèlement en règle, sans analyse préalable aucune, sans consultation et sans solution de rechange.
La Conférence régionale des élus, le Centre local de développement et la Commission jeunesse sont trois des instances de concertation et de développement qui ont été abolies et dont le travail de concertation, l’expertise et la capacité d’investissement nous font aujourd’hui défaut. Les organisations sectorielles dont le financement provenait en partie de ces instances ont aussi été ébranlées, fragilisées dans leurs structures et leur capacité d’intervention. Le Bon goût frais des Îles, la corporation culturelle Arrimage, Escale Iles-de-la-Madeleine et le Centre de recherche sur les milieux insulaires et maritimes sont au nombre des victimes collatérales des mesures d’austérité. La Municipalité des Îles chiffre pour sa part à 2 millions $ son manque à gagner depuis deux ans en raison de la diminution des revenus versés par l’État.
Le gouvernement a non seulement sabré 2 à 3 millions $ annuellement dans l’économie locale, mais c’est un peu le coffre à outils de notre région qu’il a confisqué. Par exemple, comment espérer dynamiser l’esprit d’entrepreneurship, soutenir la relève et la création d’entreprises en éliminant les services-conseils et le soutien au développement de plans d’affaires?
Priorité emploi
Alors qu’en campagne électorale, le candidat Germain Chevarie disait faire de l’emploi SA priorité, ces compressions aux Îles ont a elles seules entrainé la perte d’une bonne dizaine d’emplois. Cela n’inclut pas les coupes dans les services de santé et de l’éducation. Malgré l’accroissement de la fréquentation touristique et une année record pour la pêche au homard en 2015, les indicateurs sur l’économie des Îles et l’emploi sont glauques. Les Îles n’arrivent plus à favoriser le retour des jeunes alors que la population, en baisse, atteint le niveau de la fin des années 50. Quelques faillites retentissantes ont ponctué l’actualité. La construction résidentielle est au plus bas.
Selon le programme électoral du candidat Chevarie, la relance économique des Îles devait passer par la Stratégie maritime, des investissements en pêche et en tourisme, les travaux d’infrastructures et de lutte à l’érosion et le développement de l’industrie du loup-marin. Il reste bien sûr encore deux ans avant la prochaine élection, mais force est d’admettre qu’il y a du pain sur la planche.
Les rénovations à la mairie et au pavillon de la formation professionnelle de la commission scolaire ont certes apporté un peu d’eau au moulin. Autrement, les investissements routiers représentent à peine 50% de la moyenne des sommes annuelles investies aux Îles depuis 10 ans. Et il n’y a plus de grands chantiers dans les cartons. Quant aux routes municipales, la demande d’aide de 7 millions $ est restée lettre morte. Comme d’ailleurs la demande de soutien municipal au projet pilote en transport aérien de 4 millions $. Les projets de revitalisation des secteurs de la Pointe à Grande-Entrée et de Havre-aux-Maisons, dont on parlait encore à l’élection de 2014, semblent définitivement disparus de l’écran radar.
La mise en place annoncée d’un centre d’intervention d’urgence en mer demeure floue, voire hypothétique, tout comme la volonté d’investir massivement dans la protection contre l’érosion.
Insularité et environnement
Le dossier de la reconnaissance de l’insularité a fait l’objet de nombreuses déclarations, promesses et avis d’intention, mais les mesures concrètes restent à définir. Dans les faits, le gouvernement a rehaussé de façon statutaire les barèmes de financement des projets auxquels la municipalité des îles aura droit, une mesure qu’il s’applique finalement à la majorité des petites municipalités du Québec. L’Agglomération deviendra éventuellement la Communauté maritime des Îles, un changement d’appellation symbolique qui n’affectera ni ses pouvoirs et ni ses responsabilités.
Sur le plan environnemental, le virage au vert du premier ministre Couillard ne se traduit pas pour l’instant en gestes concrets pour l’archipel, aux prises avec plusieurs enjeux de premier plan. Les recommandations du BAPE en regard de la protection des eaux souterraines dorment toujours sur le bureau du ministre de l’Environnement. Le règlement sur le prélèvement des eaux souterraines, qui n’a pas tenu compte de ces recommandations, n’a rien changé à la vulnérabilité des nappes phréatiques des Îles.
Le dossier de l’aire marine protégée, un projet fédéral-provincial, est au point mort depuis deux ans. L’ambivalence continue quant aux intentions du gouvernement relativement à l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures au large des Îles. La loi sur les hydrocarbures n’a toujours pas été déposée. Pendant ce temps, la nouvelle politique énergétique du Québec annonce une réduction de la pétrodépendance du Québec, sans toutefois fermer la porte à l’exploitation pétrolière et, surtout, sans un plan d’actions pour atteindre ses cibles. Rien sur l’avenir de la centrale thermique d’Hydro-Québec aux Îles ou sur le développement des énergies nouvelles.
Intégrité
Sur le plan politique, la première partie du mandat de notre député aura été, à l’image de celle du gouvernement, marqué par le spectre des enquêtes et des perquisitions de l’UPAC. Il est à souhaiter que toute la lumière soit bientôt faite sur les allégations de financement illégal et de sondage dirigé lors de l’élection de 2008, qui jettent une ombre sur la vie démocratique dans l’archipel.