Le câble, l’éolien et le gaz

Gaz naturel ? Câble sous-marin ? Couplage éolien diésel? L’avenir de l’approvisionnement en électricité aux Îles apparait plus que jamais confus au lendemain du dépôt de la nouvelle politique énergétique du gouvernement Couillard, au début du mois.

Si la politique gouvernementale a généralement été bien accueillie en raison de ses objectifs ambitieux en matière de réduction des gaz à effet de serre, l’absence d’un plan d’action lui confère un sérieux déficit de crédibilité. On notera que l’enjeu des réseaux autonomes comme l’archipel font l’objet de quelques paragraphes évoquant des solutions technologiques à définir, des partenariats avec le privé et la nécessaire adhésion des communautés locales.

À n’y rien comprendre

On aurait pu s’attendre à ce que le PDG d’Hydro-Québec, Éric Martel, partage sa vision des choses à la première occasion, qu’il indique une orientation plus précise et s’engage à y travailler avec le milieu. Or, deux semaines après le dévoilement de la politique gouvernementale, M. Martel en a plutôt profité pour brouiller les pistes. Comparaissant en commission parlementaire sur les crédits budgétaires, il a dit envisager la relance du projet de câble sous-marin pour remplacer la centrale thermique, parce que le projet de jumelage éolien diésel est compromis.

Franchement, c’est à n’y rien comprendre. En premier lieu, le projet de couplage éolien diésel n’est en rien une solution de remplacement de la centrale. Il s’agit plutôt d’un moyen de prolonger légèrement sa durée de vie utile tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. En principe, l’appel d’offres pour le parc éolien de 6 MW a été suspendu pour un an, sitôt son lancement l’automne dernier. Cela permettrait de s’entendre avec le ministère de l’Environnement sur les modalités de protection du Corème de Conrad, une plante rare qu’on y retrouve. Ce même ministère avait autorisé le choix du site pour la production éolienne en 2012, en toute connaissance de cause, puis il s’est ravisé l’automne dernier.

Retour à la case départ ?

Quant au projet de câble sous-marin, la déclaration de M. Martel laisse perplexe. Le PDG de la société d’État affirme que des études ont été menées en 2011, mais que les prix ont beaucoup diminué depuis. Il faudrait savoir depuis quand au juste les prix ont chuté… Rappelons qu’Hydro-Québec a annoncé le report sine die du projet de câble sous-marin à l’été 2014. Sans révéler les chiffres de son étude, et prétextant l’efficacité de son programme de conversion au mazout – dont on sait qu’il plafonne depuis des années – la société d’État en a profité pour prolonger de 12 ans la durée de vie utile de sa centrale, à 2035. Un retour à la case départ pour le moins difficile à suivre !

Pour compliquer encore les choses, M. Martel ajoute que toutes les options sont sur la table, y compris le gaz naturel liquéfié (GNL). Lors du lancement de sa stratégie sur les hydrocarbures, en juin 2014, le gouvernement a fait part de ses intentions de favoriser la conversion des industries et des navires au GNL. La conversion de la centrale a aussi été évoquée. Les propos de M. Martel accréditent donc la thèse voulant qu’Hydro-Québec étudie la possibilité de convertir la centrale au gaz naturel. Il s’agirait d’un changement de cap important alors que la société d’État écartait cette possibilité du revers de la main, il y a quatre ans à peine, au plus fort de la controverse entourant le projet de forages gaziers proposés par Gastem.

Du gaz naturel… local ?

L’entreprise, dirigée par Raymond Savoie, n’a plus remis les pieds aux Îles depuis sa litigieuse tournée de consultation. Sa valeur en bourse a depuis considérablement chuté. On peut toutefois se demander ce qu’il adviendrait si des promoteurs plus habiles, voire des intérêts locaux, se portaient acquéreurs des droits d’exploration de Gastem. Rappelons que le récent Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection n’a rien changé quant au droit de forer sur l’archipel tandis que les recommandations du BAPE sur l’exploration gazière et les sources phréatiques de 2013 n’ont jamais été mises en œuvre.

En attendant, des consultations ciblées se tiennent dans l’archipel en vue de l’adoption d’une stratégie énergétique territoriale sous l’égide de la municipalité. Nous l’avons déjà dit à maintes reprises, une stratégie locale ne peut voir le jour sans une participation active et un engagement d’Hydro-Québec en tant que partenaire de la démarche. Un premier geste en ce sens serait d’agir en toute transparence en clarifiant les données disponibles sur le projet de câble sous-marin et en faisant le point sur les diverses alternatives envisagées.

Payant, l’éolien

Quant à l’éolien, il faut espérer que le projet de couplage sera relancé bientôt, pour des raisons environnementales… et économiques. Notons que la Municipalité des Îles encaissera pas moins de 650 000 $ par année en revenus d’exploitation des parcs éoliens communautaires en Gaspésie à compter de 2018. Des retombées issues d’un travail de concertation mené par la Conférence des élus Gaspésie-Les Îles, aujourd’hui abolie. Des revenus qui, ironiquement, se confirment alors même que la nouvelle politique énergétique gouvernementale place justement l’éolien sur la voie d’évitement.2014-09-28 14.39.49

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