La visite aux Iles du PDG d’Hydro-Québec, Eric Martel, la semaine dernière, a permis de clarifier au moins un enjeu : l’important n’est pas de conserver à tout prix la centrale thermique mais plutôt de maintenir l’impact économique de la présence de la société d’Etat dans l’archipel. La question n’est d’ailleurs pas tant de savoir si la centrale au mazout sera un jour remplacée, mais quand et par quel autre mode de production d’électricité?
Personne ne souhaite nécessairement la fermeture de la centrale, mais les coûts prohibitifs de production qui y sont associés et la pollution qu’elle génère forcent la réflexion. Une tâche qui incombe bien-sûr à Hydro-Québec, en y associant les Madelinots.
Des inquiétudes
Suite à la récente publication du Plan stratégique de la société d’État, certains avaient cru erronément à la volonté d’Hydro-Québec de procéder à une conversion rapide de sa centrale, sinon de la fermer prématurément. En fait, le plan stipule simplement qu’Hydro-Québec entend lancer des appels de propositions en 2019 afin d’évaluer les mesures de conversion de la centrale éventuellement aptes à réduire son empreinte écologique et ses coûts de production. Quand on sait que le projet d’intégration éolien-diésel de 6 MW remonte à une douzaine d’années, et n’a toujours pas obtenu le feu vert du gouvernement, on peut bien imaginer qu’on ne remplacera pas la centrale thermique par un câble sous-marin sur un coup de tête.
Maintenir les retombées
Il est d’ailleurs de bon augure qu’Hydro-Québec s’interroge dès maintenant sur ce qu’il adviendra de la production d’électricité aux Iles au-delà de la durée de vie utile de sa centrale, actuellement estimée à 2035. Les questions de coût, de fiabilité et d’impact environnemental entreront dans la balance dans la décision d’Hydro-Québec. Ce qui est rafraîchissant dans les propos tenus publiquement par M. Martel, c’est la reconnaissance explicite que les retombées économiques des opérations de la centrale et les emplois dans l’archipel doivent être maintenus et son engagement à y arriver en collaboration avec le milieu. On parle ici de quelques dizaines de millions $ par année.
Eric Martel a non seulement affirmé sa volonté de maintenir les emplois et les retombées de la présence de la centrale aux Îles même si elle devait être démantelée, mais il a même évoqué quelques pistes de réflexion. Parmi celles-ci, la possibilité de créer un centre de recherche aux Îles en lien avec les énergies renouvelables apparaît particulièrement prometteuse. L’idée de délocaliser un centre d’opération ou de service de la société d’État vers notre archipel est tout aussi attrayante.
Vision de développement
Ces solutions s’inscrivent surtout dans la vision de développement durable de l’archipel martelée auprès des gouvernements par les intervenants locaux depuis une dizaine d’années. Une telle approche pourrait d’ailleurs servir d’exemple au gouvernement qui fait la sourde oreille aux demandes de déploiement d’un centre de service aux Îles depuis plusieurs années. Elle pourrait aussi donner naissance à l’établissement d’un pôle de recherche ou de services administratifs divers pouvant inclure l’entreprise privée, le Mouvement Desjardins, etc. Comme le dit si bien M. Martel, des milliers d’emplois peuvent maintenant s’opérer de partout au Québec, pourvu qu’on ait un réseau de télécommunications à haut débit. L’archipel possède aussi quelques avantages comparatifs notables, dont la stabilité de la main d’œuvre et la qualité de vie du milieu, que les employeurs recherchent de plus en plus.
Stratégie énergétique
On doit aussi prendre bonne note du fait que le PDG d’Hydro-Québec affirme vouloir améliorer le bilan écologique de la société d’État de même que la communication avec la clientèle et les communautés. La gestion de l’information relative au déversement d’hydrocarbures dans le port de Cap-aux-Meules pourra ici servir de contre-exemple.
Eric Martel s’engage donc à travailler conjointement avec le milieu pour trouver les meilleures solutions technologiques, économiques, environnementales et sociales aux divers enjeux énergétiques auxquels notre milieu insulaire est confronté. Pour prouver sa bonne volonté, il serait opportun de la part de la société d’État de s’engager pleinement dans la démarche d’élaboration de la stratégie énergétique du territoire. On l’a maintes fois dit et répété, Hydro-Québec est l’acteur-clé de toute stratégie énergétique dans l’archipel, que ce soit dans la production d’électricité, les mesures éventuelles de transition ou la mise en œuvre de programmes d’économie d’énergie. Hydro-Québec doit non seulement faire part de ses bonnes intentions, mais elle doit s’engager à participer aux consultations citoyennes et aux forums qui ne manqueront pas de ponctuer les réflexions collectives à venir. Elle devra s’engager avec la communauté, fournir l’information qu’elle possède, se mettre à l’écoute, mais aussi inclure les citoyens à son propre processus décisionnel. C’est ce à quoi on s’attend d’un partenaire du milieu.