Aquarium des Îles: un nouveau départ

Après plusieurs mois de tumulte, l’Aquarium des Îles entreprend une nouvelle phase de réorientation et de relance dont on peut espérer qu’elle consolidera enfin les bases de cet établissement muséal et touristique de grande valeur.

À l’aube du 30e anniversaire de l’aquarium, les membres de l’organisme étaient confrontés cette semaine à trois options pour l’avenir : la dissolution, le statu quo ou la diversification. Cette dernière avenue, la plus ambitieuse, la plus optimiste, mais aussi la plus ardue, a été retenue par une vaste majorité des participants. Il s’agit probablement du plan de relance de la dernière chance pour cet établissement situé au cœur du site historique de la Grave. La continuité des opérations sans changement était peu réaliste et pour le moins hasardeuse, ne faisant que repousser l’échéance d’une fermeture à plus ou moins brève échéance.

De crise en crise

Comme plusieurs organismes sans but lucratif du milieu, l’Aquarium des Îles lutte pour sa survie depuis une bonne une bonne quinzaine d’années. Comme d‘autres, il a éprouvé des difficultés financières. Comme d’autres, il a connu des problèmes de gestion, il a vécu des crises organisationnelles et de gouvernance. Comme d’autres, il a du revoir sa mission. Comme d’autres encore, il a été confronté à des investissements en infrastructures dont il n’avait pas les moyens. Or, l’Aquarium des Îles est vraisemblablement le seul organisme des Îles à avoir traversé toutes ces situations sans exception, de façon successive ou concurrente, depuis une dizaine d’années ! Sa survie jusqu’à ce jour constitue à elle seule un exploit. Et une preuve malgré tout de sa pertinence, de sa résilience et d’une certaine confiance des gens du milieu envers sa mission et son avenir.

Le patrimoine et la science

Visant initialement à mettre en valeur la culture maritime, les techniques de pêche et les espèces marines qui nous entourent, l’aquarium a bénéficié de programmes de subventions, tant provinciaux que fédéraux, pour élargir son rôle, améliorer ses équipements et consolider sa mission. Au tournant des années 2000, un plan de développement et de commercialisation l’a incité à prendre un virage et une orientation scientifique, sans que l’organisme ne trouve toutefois les compétences, les partenaires et les moyens d’assumer pleinement de telles responsabilités. L’aquarium a néanmoins compté jusqu’à une douzaine d’employés saisonniers, et reçu jusqu’à 12 000 visiteurs pendant la courte saison touristique madelinienne.

C’est le désengagement fédéral, puis provincial de son financement en infrastructures et au fonctionnement – par projets – qui a provoqué la fragilisation de l’organisme qui s’est poursuivi depuis 2006. À cela se sont ajoutés le plafonnement puis la chute des revenus générés de façon autonome. De difficultés financières en crises organisationnelles, l’aquarium vogue depuis ce temps de plans de relance en menaces de fermeture.

Mentionnons au passage l’interprétation restrictive et technocratique des lois fédérales qui a privé l’aquarium de ses phoques depuis 2012, une attraction qui était responsable à elle seule de plus de 20% de ses statistiques de fréquentation.

Problème structurel

La mise à la porte des administrateurs de l’aquarium, en assemblée générale annuelle l’automne dernier, suivie de la menace de dissolution de l’organisme, ne sont donc que les plus récents chapitres d’un long feuilleton. On peut bien sûr déplorer le mépris apparent des procédures démocratiques de l’assemblée générale du mois d’octobre et le peu de considération démontré envers des bénévoles qui ont tenu l’aquarium à bout de bras pendant deux ans. Force est toutefois d’admettre que le nouveau conseil d’administration a fait preuve de suffisamment de transparence pour obtenir l’aval de ses membres pour envisager et entreprendre un nouveau départ.

C’est donc à travers l’élargissement du rôle et de la mission pédagogique de l’aquarium que les nouveaux administrateurs espèrent en assurer la relance et la pérennité. On reviendra ainsi à une mission davantage tournée sur l’histoire, le monde maritime et même les savoir-faire en construction navale pour diversifier l’offre de l’établissement en même temps que ses sources de revenus. Le jeu en vaut très certainement la chandelle.

Surtout que le droit d’usage même du bâtiment, datant de 1895, est mis en doute pour des raisons de salubrité et de structure. Déjà en 2011, on estimait les investissements nécessaires en équipements et en rénovations à plus de 600 000$. Le choix de réduire les opérations de l’aquarium à sa plus simple expression au cours de l’été qui vient semble un choix raisonnable dans les circonstances.

Déficit structurel

Il faudra donc du temps pour revoir la mission et redéfinir l’offre de service de l’Aquarium des Îles. Il faudra surtout de la détermination et de la ténacité pour élaborer des demandes de subvention et obtenir l’aval des pouvoirs publics pour sauvegarder le bâtiment et lui redonner la place qui lui revient dans l’espace public et touristique de la Grave. On pourra sans doute à cet égard tabler sur le rôle unique, distinctif et essentiel que peut jouer l’organisme dans la préservation, la mise en valeur et la transmission des connaissances sur le milieu marin et les savoir-faire maritimes, non seulement dans l’archipel, mais à l’échelle du Québec.

Le défi sera plus imposant encore en ce qui à trait au fonctionnement à venir, et à long terme, de l’aquarium. Comme l’ensemble des organismes et établissements du secteur de la culture et du patrimoine, l’Aquarium des Îles aura besoin d’un soutien financier au fonctionnement pour combler le déficit structurel avec lequel il devra vraisemblablement composer. À la différence du seul autre aquarium que compte le Québec, situé dans la vieille capitale, l’Aquarium des Îles est reconnu comme institution muséale par le gouvernement du Québec, mais non financé. L’Aquarium de Québec bénéficie au contraire d’un important influx de fonds publics.

La recherche de partenaires, privés et publics, risque de s’avérer son plus grand défi. Et l’appui du milieu son meilleur atout.Capture d'écran 2017-03-17 08.16.27

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