L’éolien vent debout

Le désintérêt d’Hydro-Québec pour la filière éolienne est patent depuis les premiers pas de l’industrie québécoise au tournant des années 2000. Deux exemples tirés de l’actualité récente nous démontrent que les régions comme l’archipel et la Gaspésie auront encore fort à faire pour consolider les retombées de la filière au profit des communautés.

Le projet de couplage éolien-diésel aux Îles est, en cela, un exemple patent. La valeur écologique et économique du projet dans le contexte insulaire fait depuis longtemps consensus. Après des années d’études, Hydro-Québec a enfin annoncé le lancement des appels d’offres pour un parc de 6 MW en octobre dernier. Quelques semaines plus tard, à la veille de Noël, on annonçait le report du processus d’au moins un an. Officiellement, c’est le ministère de l’Environnement qui met du sable dans l’engrenage suite à la «découverte» d’une espèce floristique menacée dans la zone ciblée… Il faut savoir que ce même ministère approuvé le zonage en toute connaissance de cause il y a trois ans. Incompétence ou mauvaise foi, le ministère devra s’expliquer. Il n’en demeure pas moins qu’Hydro-Québec, après avoir reconfiguré tout l’environnement et le bassin hydrographique du nord québécois, n’a pas vu venir cette embûche. L’annonce ne semble d’ailleurs pas la décevoir outre mesure. Il faut dire qu’à la surprise des promoteurs intéressés, Hydro-Québec n’avait aucune mesure de vents à offrir pour le site choisi, ce qui est loin d’être un détail.

D’analyses en études, de faux départs en reports, le dossier n’en fini plus de ne pas aboutir depuis plus de 10 ans. On peut raisonnablement penser que le cœur n’y est pas. Il n’a fallu à Hydro-Québec que 4 ans et demi pour construire le barrage Manic 5, moins de deux ans pour la centrale thermique de Cap-aux-Meules. Évidemment, ces exemples n’ont rien à voir avec l’éolien, mais ils illustrent néanmoins le fait que, lorsqu’Hydro-Québec y met les efforts, l’énergie (!), son poids politique et une volonté ferme, ses projets vont bon train.

L’éolien, bouc émissaire

Il faut dire qu’Hydro-Québec n’a jamais été d’accord avec le développement éolien au Québec, le gouvernement le lui a imposé. Depuis, la société d’État ne manque pas une occasion de discréditer la filière, qui procure aujourd’hui 5 mille emplois au Québec, dont la moitié en Gaspésie, en attribuant principalement ses hausses annuelles de tarifs aux coûts de l’éolien. Or, une récente étude commandée par le Technocentre éolien indique qu’Hydro-Québec induirait le gouvernement, la Régie de l’Énergie et les contribuables en erreur. Selon l’analyse indépendante, l’éolien compterait pour 28,4 % des hausses de tarifs, et non pas 52,5%. Dans les médias, Hydro-Québec défend bien sûr ses propres données.

Ce qu’il y a de remarquable dans cet épisode, c’est que, pour une rare fois, les calculs complexes de la société d’État sont mis en doute. La réaction d’Hydro-Québec, prévisible, appelle à l’argument d’autorité sur la base de son expertise inégalable. Or, elle est aussi la seule à détenir toute l’information et contrôler tous les paramètres utiles à son argumentation.

C’est ici que le cas de la centrale au gaz naturel de Bécancour est instructif. Le journal Le Devoir révélait la semaine dernière que la centrale, construite par TransCanada en 2006 puis fermée en 2008, aura coûté 2 milliards $ sur une période de 30 ans. En réaction, le PDG d’Hydro-Québec, Éric Martel, a dit juger la centrale «très utile». Comment ne pas croire qu’avec un peu de bonne volonté, Hydro-Québec trouverait les arguments économiques pour promouvoir la filière éolienne et les moyens de concrétiser un petit parc éolien dans l’archipel.Éolienne2

2 réflexions sur “L’éolien vent debout

  1. M. Joël… je suis d’accord avec ce que tu nous exposes dans cet article et cela m’amène à une question…
    Pourrait-on former une Cie d’éolienne qui fournirait de l’électricité au Québec et qui ferait concurrence à Hydro Québec…
    Ex:… aux Îles, ce n’est pas le vent qui manque.
    Donc avec un parc d’éolienne…me semble que ça coûterait mois cher de faire tourner ces (Gros Prépalas) que de vider de huile dans nos ports comme s’est arrivé à Cap aux Meules et continuer à polluer l’eau, l’air et la terre…je ne veux pas …châler… je me pose simplement la question…c’est vrai que l’ hydro se sert de l’éolienne pour nous faire avaler de nouveaux tarifs… toujours plus hauts…merci de me répondre…

    J’aime

    • Bonjour William,
      Merci pour ta question.
      Comme tu le sais, la mise en place d’Hydro-Québec découle de la nationalisation des compagnies d’électricité réalisée en 1962 par René Lévesque, alors ministre des Richesses naturelles sous Jean Lesage.
      La Société d’état étant en situation de monopole, la filière éolienne ne pourra se développer aux Îles comme ailleurs au Québec que si Hydro-Québec s’y intéresse résolument.
      Une fois cette condition remplie, plusieurs modèles sont envisageable (compagnies privées, coopératives, partenariats municipaux) pour produire l’énergie et la vendre à Hydro.
      J.

      J’aime

Répondre à William Lapierre Annuler la réponse.