Encore ce printemps, le ressac de la mer a mis à découvert un site d’enfouissement de sacs de mazout dans la Dune du Nord, lourd héritage du naufrage de la barge Irving Whale. Bien que la Garde côtière s’acquitte chaque fois de sa responsabilité de tout nettoyer et de faire restaurer le site, on ne peut s’empêcher de penser qu’une approche plus active donnerait vraisemblablement de meilleurs résultats.
Comme toujours, c’est un randonneur qui a trouvé le site par hasard et qui en a signalé la présence à l’organisme Attention Frag’îles. Cette approche réactive, qui consiste à laisser les courants, les marées et les passants faire tout le travail de repérage, nous condamne à ces « opérations nettoyage » épisodiques qui nous rappellent que ce n’est que la pointe de l’iceberg.
Des pratiques révolues
À ce jour, environ 8500 sacs de sable imbibés de mazout lourd ont été retirés de la dune du Nord et de l’Ouest depuis une vingtaine d’années. La plus récente opération a permis de récupérer quelque 325 sacs de plus, sur les dizaines de milliers de sacs initialement enfouis lors de la catastrophe environnementale de septembre 1970. À ce rythme, on en aura pour des siècles et des siècles. Ou pas. Car personne ne sait combien exactement de sacs ont été enfouis et combien ont été réellement recouvrés.
Au départ, ce sont bien 200,000 sacs de plastique qui ont été distribués dans l’archipel pour y pelleter le sable souillé de résidus pétroliers et de BPC. Aucun décompte n’a toutefois été réalisé quant au nombre de ces sacs qui ont été utilisés aux fins du nettoyage, tout comme aucun registre des lieux d’enfouissement n’a été tenu. On rapporte que des Madelinots ont été particulièrement inventifs dans la façon d’employer les sacs excédentaires. N’empêche, près de 150 000 sacs auraient été remplis selon les estimations de la garde côtière. Or, à l’été 1971, les autorités fédérales ont entrepris une vaste opération de nettoyage des dunes. Les sites repérables ont été mis à découvert et des milliers de sacs ont été brulés à ciel ouvert dans de vieilles «barriques» de métal pendant des semaines. Toujours sans aucun décompte. Il s’agit de pratiques heureusement révolues, mais qui nous confinent à une certaine ignorance sur l’état actuel de la situation.
Un danger?
La découverte fréquente et inopinée de sacs de mazout a le mérite de nous rappeler à répétition les risques associés au transport de produits dangereux au large de nos côtes et à notre pétrodépendance. Cela étant, en tant que destination touristique de choix, à titre de communauté pour laquelle la qualité de vie et de l’environnement sont primordiales et comme exportateur de poissons et fruits mer de première qualité, on se passerait bien de cette mauvaise publicité.
Mentionnons tout de même qu’il s’agit davantage de gestion d’image que de gestion des risques. Car selon diverses études indépendantes menées lors de la révision du dossier par la Garde côtière en 2009-2010, la toxicité des sacs de mazout est pratiquement nulle. On ne trouve plus dans la faune ou la flore aucune trace des 6800 litres de BPC qui se sont envolés dans la nature, même pas dans les échantillons de sable prélevés dans les sacs de plastique retrouvés. Les boulettes de mazout durci sont stables et, tant qu’elles sont enfouies, ne posent aucun risque pour l’environnement, les organismes marins ou la santé humaine. Cela étant, personne ne souhaite vivre, se baigner ou simplement se promener sans le savoir aux abords d’un dépotoir d’hydrocarbures ensachés.
Que faire ?
Appelée à reconsidérer sa stratégie d’intervention attentiste, en 2010, la Garde côtière a finalement maintenu son approche qui consiste à intervenir uniquement sur appel. Les essais de détection par géoradar étant qualifiés de peu concluants, elle a aussi soutenu que des excavations de grande envergure, à tâtons, causeraient davantage de dommage aux dunes qu’autre chose. Cela est sans doute juste, mais surtout plutôt commode pour l’organisme fédéral.
La dune bordière constitue un écosystème à la fois fragile et dynamique dont l’effet de protection contre les assauts de la mer est irremplaçable. Toute opération approximative d’excavation serait certes condamnable, en plus d’être vouée à l’échec. Cela dit, la recherche de méthodes de détection efficaces des sites d’enfouissement a été trop rapidement abandonnée. Les technologies et l’imagerie numérique ont évolué à vive allure ces dernières années en génie minier comme en santé, voire en archéologie, et il y a fort à parier que des études rigoureuses et adéquatement financées permettraient d’y voir plus clair. Comme on dit, des chercheurs qui cherchent, on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche. Dans le cas présent, il n’y a ni l’un, ni l’autre.
L’autre volet de la recherche, locale et citoyenne, est aussi négligé. La Garde côtière a mis fin aux patrouilles de reconnaissance qu’elle avait soutenues pendant quelque temps en 2008-2009. Il est pourtant admis qu’une intervention rapide constitue la meilleure façon d’empêcher la remise en circulation des contaminants agglutinés dans les sacs par effet de lixiviation. Minimalement, la Garde côtière n’a aucune excuse pour ne pas avoir au moins une page web identifiant l’ensemble des sites répertoriés, géolocalisés et à jour, et qui permette à chacun de signifier la découverte d’un sac en temps réel, par le biais d’une simple application. «Parce qu’on est en 2016…»
Ce que je trouve le PLUS scandaleux, c’est que le pollueur, la compagnie pétrolière IRVING, s’en soit tiré à si bon compte. D’autant plus que le vieux Cecil qqchose Irving avait, par testament, légué sa colossale fortune à ses 3 ou 4 fils, À LA CONDITION ABSOLUE qu’ils ne paient JAMAIS d’IMPÔTS au Canada. Des ESCROCS GRAVES, selon moi.
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