À l’occasion de la troisième édition de la rencontre des partenaires du Forum Horizon 2025, des dizaines de citoyens ont pris la mesure du défi démographique. Ils ont aussi, et surtout, convenu de la nécessité de se remettre en marche pour l’attraction de nouveaux arrivants, la création d’emploi et la diversification économique.
Se remettre en marche, car pour l’une des premières fois depuis les vastes consultations de 2012-2013 pour l’élaboration de ce projet de territoire, les enjeux macroéconomiques étaient remis à l’ordre du jour lors de discussions publiques, ouvertes à la participation citoyenne.
Il faut dire que depuis l’adoption du projet de territoire, en octobre 2013, la population madelinienne, comme la plupart des organismes qui ont survécus aux mesures d’austérité du gouvernement, ont été davantage préoccupés par le présent, et leur survie immédiate, que par l’avenir de l’archipel.
De la présentation des rapports d’ateliers se dégageait une forte impression de déjà vu, ou de déjà entendu. Non pas que les discussions de fussent pas profondes, pertinentes et sans doute stimulantes, mais les conclusions nous ramènent exactement à l’ensemble des défis et priorités inscrits il y a trois ans au plan d’action Horizon 2025. Il n’y a rien là de négatif, au contraire, puisqu’il s’agit de renouer avec des enjeux et défis insulaires complexes et souvent récurrents. Il est inutile de réinventer la roue quand on possède déjà une carte routière précise et que la destination est connue. Force est toutefois de constater qu’il aura fallu deux longues années pour se sortir de la torpeur dans laquelle le régime de compressions gouvernementales et la mise au rancart de notre modèle de développement régional nous avaient plongés.
Démographie
Nous l’avions identifié à plusieurs reprises dans ces pages, le défi démographique est plus que jamais l’enjeu prioritaire de développement de l’archipel. Les chiffres sur le vieillissement de la population, la dénatalité et le déficit de migration interrégional sont dramatiques et implacables. Seul point positif dans ce sombre tableau, le taux de rétention dans l’archipel est comparativement plus élevé ici que dans bien des régions du Québec. Sinon, on constate que la proportion des personnes âgées aura presque doublé d’ici 20 ans tandis que la population active sera en chute libre et que le nombre de jeunes continuera de décroitre.
Ce portrait appelle à une mobilisation générale en faveur de l’amélioration des conditions de vie des aînés, du maintien des infrastructures et des services pour rendre le milieu attrayant, mais surtout de l’amélioration du marché de l’emploi, du développement de l’entrepreneuriat et de la diversification économique. Tous ces éléments viendront donner corps à une stratégie «d’attraction, de rétention et d’enracinement» afin de contrer tous ces indicateurs négatifs.
La main d’oeuvre
La rencontre a également permis de présenter au public les résultats d’une étude sur la main d’œuvre aux Îles, réalisée l’été dernier. À la surprise de plusieurs, malgré l’impression de la majorité, il existe de nombreux postes à combler dans l’archipel. Un total de 583 postes seraient à combler d’ici trois ans. La main d’oeuvre dite «ouvrière» serait particulièrement en demande. Ces chiffres doivent cependant être utilisés avec circonspection, car ils ne distinguent pas les emplois à temps complet des emplois à temps partiel et ne tiennent pas compte de la saisonnalité des emplois.
Cette étude démontre surtout que plusieurs entreprises devront faire place à la relève d’ici les prochaines années. Un constat qui va de pair avec le vieillissement de la population. Cela s’observe dans la plupart des secteurs, y compris la pêche.
Or, pour doter les îles d’une structure économique plus dynamique, forte et offrant des emplois de qualité et bien rémunérés, une véritable stratégie de diversification économique et de développement entrepreneurial doit impérativement voir le jour. On comprend mal, d’ailleurs, ce qui a mené à la mise au rancart du concept de communauté entrepreneuriale, il y a deux ans, sans stratégie alternative. Quant à l’élaboration d’un plan de développement économique, c’est au printemps que la Communauté maritime donne rendez-vous aux Madelinots à l’occasion d’un Forum économique fort à propos.
Le bilan
Un rendez-vous économique de grande ampleur qu’on espère mobilisateur, et en phase avec les orientations du projet de territoire Horizon 2025. La vitalité économique est en effet indissociable de la vitalité socioculturelle d’une communauté. Il s’agit en fait d’un facteur essentiel de réussite.
Quand on trace l’état d’avancement des 74 actions inscrites au projet de territoire Horizon 2025, on constate à première vue que 75% d’entre elles sont réalisées ou en voie de l’être. En y regardant de plus près, on observe cependant que la moitié de ces actions s’inscrivent en continu, dans le mandat propre des instances qui en ont la responsabilité. Parmi les dossiers qui sortent du travail régulier et de l’intendance, on identifiera néanmoins l’adoption du décret de reconnaissance de l’insularité par le gouvernement comme une réalisation notable, un geste porteur de promesses.
Cela étant, c’est toutefois près du quart des actions du projet de territoire qui ont été annulées ou retardées, dont le spectaculaire et navrant recul dans le dossier d’allongement de l’aéroport. Quelques-unes de ces actions figurent d’ailleurs aux orientations 2 et 3 du plan d’action, visant à consolider et diversifier l’économie et renforcer notre capacité d’agir. On y retrouve par exemple la stratégie d’attraction des télétravailleurs, l’implantation d’un centre de services gouvernemental et la mise en œuvre d’une communauté entrepreneuriale.
La rencontre de la semaine dernière aura certainement permis de nous rappeler l’ampleur des défis démographiques et économiques auquel nous devrons collectivement faire face. Seule une vaste mobilisation citoyenne autour de notre projet de territoire assurera l’avancement et l’atteinte de tous nos objectifs. C’est d’ailleurs l’essence même du projet de territoire, tel qu’il fut imaginé au départ : un projet de société porté par la communauté.
